Monsieur le Président,
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Vous savez sans doute que le Tribunal, s'il vous a dit recevable en votre constitution de partie civile, vous a cependant renvoyé dans le mois suivant la fin de votre mandat pour la liquidation de votre préjudice. Votre avocat, notre confrère HERZOG, avait qualifié ce jugement d' « extravagant », ce qui nous semblait déjà dépasser de très loin la critique admissible en la matière.
La lecture de l'article intitulé « Le proc' COURROYE bouffe du Juge » paru le 16 décembre 2009 dans le Canard Enchainé nous scandalise plus encore. En effet, il y est fait mention dans le 3ème paragraphe de ce que les « poursuites disciplinaires » demandées par Monsieur COURROYE, Procureur de la République, à l'encontre de ce magistrat du siège se fonderaient, notamment, sur sa décision relative à votre constitution de partie civile.
[...]
Cette démarche, si elle était avérée, nous semblerait démontrer, d'une part, une fébrilité incompatible avec l'oeuvre de justice et, d'autre part, une volonté, déjà bien affirmée, de prise en main de l'autorité judiciaire. En effet, la 9ème chambre de la Cour d'Appel de VERSAILLES n'a pas encore rendu son arrêt.
Malgré l'indépendance, le courage même, dont ont pu faire preuve au cours de leur carrière les magistrats la composant, nous considérons que l'initiative du Procureur constitue une intolérable pression. Doivent-ils craindre, eux aussi, une enquête administrative ou quelque poursuite disciplinaire pour le cas où leur arrêt ne satisferait pas Monsieur COURROYE ?
Nous avions déjà mis l'accent au cours des audiences sur l'implication inhabituelle de celui-ci dans ce dossier : outre le caractère disproportionné de l'enquête qu'il avait initiée et des réquisitions systématiques de placement en détention provisoire prises par son Parquet, il n'avait pas hésité, nonobstant l'affirmation publique des liens qui vous unissent, à signer de sa main le réquisitoire définitif de renvoi de l'ensemble des personnes mises en examen devant le Tribunal Correctionnel, alors même qu'il n'en était pas le rédacteur. Le Juge d'Instruction l'ayant repris quasiment in extenso dans son ordonnance de renvoi, cette copie conforme du réquisitoire aboutissait de fait à ce que la juridiction, amenée à statuer sur votre constitution de partie civile, soit saisie par l'un de vos amis.
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Nous pouvons affirmer, sans crainte d'un quelconque démenti, qu'aucun autre justiciable n'a, hélas, à ce jour, bénéficié de tant de sollicitude de la part d'un Procureur de la République. La demande de sanction ou d'enquête à l'encontre d'un magistrat du siège, dont l'indépendance est pourtant garantie par la Constitution, finit de démontrer que, décidemment, vous n'êtes pas un citoyen comme les autres, spécialement lorsque vous décidez de saisir la Justice, avec l'assistance, au surplus, de l'un de vos intimes, nommé par vos soins à son poste malgré l'avis contraire du Conseil Supérieur de la Magistrature.
Compte tenu de votre qualité revendiquée de partie civile dans ce dossier, il peut certes paraître surprenant de vous alerter mais il reste qu'en raison de vos fonctions et des charges qui y sont attachées, vous ne sauriez admettre de tels agissements qui mettent en cause les fondements même de notre démocratie.
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