Comme d'habitude, la presse classique n'a pas jugé bon de commenter le principal aspect des vœux prononcés par l'actuel président de la république au soir du 31 décembre. C'est bien dommage, car tout le drame de l'acteur principal y était exposé.
Pour la première fois, un président de la république française a présenté ses vœux au peuple français dans un décor virtuel, décor réalisé à base d'effets numériques dignes d'Avatar. Pas de pendule, pas de bureau, pas de bibliothèque.
Terrible erreur de communication.
1/ Dans ce décor virtuel, le président apparaît comme coupé de son lieu de pouvoir. Rien n'y est réel. Pas de vie. Le bureau élyséen, la bibliothèque ou la salle des fêtes donnant sur le parc, sont des lieux familiers pour tous les Français depuis de Gaulle. Tous les présidents de la Ve se sont exprimés dans ces cadres (parfois il s'agissait d'un décor certes, mais réel, reconstituant le bureau présidentiel). Que chacun d'entre eux, de Pompidou à Chirac, en passant par Giscard et Mitterrand ait respecté ce décorum, exposant son corps dans le même décor, participait à l'idée que les présidents ont beau se succéder, le pouvoir reste et les objets du décor en font témoignage. Ces lieux sont imprégnés de l'esprit de ceux qui les ont occupés précédemment. Celui qui y paraît est le continuateur d'une histoire. Un héritier qui tire sa légitimité de sa présence en ces lieux autrefois fréquentés par les souverains qui l'y ont précédé.
Subtil prolongement médiatique de la théorie des deux corps du roi, la présence d'un individu dans un décor quasi identique, familier, que l'on sait être celui du titulaire du pouvoir suprême, cette présence dans un décor permanent l'identifie de facto comme le seul titulaire du pouvoir suprême: le président, le souverain. Ce qu'il dit compte alors. Sa parole est sacrée. Ses mots pèsent. A votre avis, pourquoi, depuis Roosevelt, les présidents américains s'adressent-ils toujours au peuple dans le cadre connu et reconnu du bureau ovale de la Maison Blanche ?
2/ Mais dans un décor virtuel, donc irréel, le corps du souverain est à son tour perçu comme virtuel. Et par conséquent, ce qu'il dit relève nécessairement de la fiction. Qu'est-ce qui peut être réel dans le virtuel? Rien. Ainsi, la phrase clé du discours présidentiel, « Je ne suis pas homme qui renonce à la première difficulté » ne peut être perçue que comme une déclaration tout aussi virtuelle que le décor au sein duquel elle est prononcée. Tout ça, c'est du cinéma. De la fiction. Du virtuel. Du show. Et comme le personnage de ce show est de plus en plus perçu comme un histrion, un capitan de la politique, déconnecté de la vraie vie des vraies gens, qui ne se comporte pas en président, ne vit pas en président, n'est pas président, l'effet en est décuplé. La preuve qu'il n'est pas président, c'est qu'il n'occupe même plus les lieux de la présidence.
En sacrifiant au vertige de la technique au détriment du symbole, le personnage unique du show présidentiel virtuel s'est, une fois de plus, dépouillé du corps du roi. Il est le héros d'une aventure irréelle, à côté du vrai monde, s'inventant une histoire, palpitante certes, mais qui n'est pas celle des présidents de la république. Dans son décor imaginaire, il joue au président, mais il ne l'est pas réellement. Aux yeux du peuple français, et au sens propre du terme, c'est un avatar.
Bruno Roger-Petit pour LePost
4 commentaires:
Jeudi 31 décembre 2009
Françaises, Français, mes chers compatriotes,
L’année qui s’achève a été difficile pour vous tous. Rien ne vous a été épargné.Je vous ai imposé de nouvelles peines, de nouvelles souffrances, de nouvelles taxes en France plus qu'ailleurs. Je pense en particulier à ceux qui ont perdu leur emploi. Cependant si notre pays a été moins éprouvé que beaucoup d’autres,nous le devons à notre modèle social qui a amorti le choc et non pas aux mesures énergiques que je n'ai pas prises pour soutenir l’activité.
Mais c’est à Moi que revient le plus grand mérite. Je veux rendre hommage ce soir à mon sang-froid et à mon courage face à la crise. Je veux rendre un hommage particulier aux partenaires sociaux qui ont fait preuve d’un grand sens des responsabilités, aux associations qui ont secouru ceux qui en avaient le plus besoin et non pas aux chefs d’entreprises,mes amis du Fouquet's, qui se sont efforcés de détruire le maximum d'emplois.
Ensemble vous n'avez pas évité le pire. Je n'ai pas non plus préparé l’avenir,laissant une dette de 1500 000 000 000 € que vos enfants devont payer. Au moment où tout laisse à penser que la croissance ne va pas revenir, nous voyons qu’au cours de cette année, au milieu des difficultés de toutes sortes, le monde n'a pas changé.
Aucune nouvelle organisation mondiale ne se dessine à travers le G20. Des problèmes qui soulevaient depuis bien longtemps une grande émotion et qui paraissaient insolubles, comme les bonus extravagants ou les paradis fiscaux, ne sont pas en voie d’être résolus.
Tout cela continue de plus belle.
Il n’est pas jusqu’au sommet de Copenhague qui n’ait fermé une porte sur l’avenir en ne parvenant pas à faire prendre par tous les Etats des engagements chiffrés de lutte contre le réchauffement climatique et en ne posant pas le principe d’un financement pour les pays pauvres qui ne sera pas assuré par la taxation de la spéculation financière.
L’Europe ne s'est toujours pas dotée des institutions qui lui permettraient d’agir et la France a continué à ne pas se transformer. Elle arrive au terme de cette année avec une fiscalité plus favorable aux patrons (mes amis du Fouquet's) grâce à la réforme de la taxe professionnelle, un lycée qui ne prépare pas mieux à l’enseignement supérieur, des universités toujours pas autonomes, un service minimum dans les transports publics qui ne fonctionne pas, le RSA qui n'encourage pas la reprise d’activité pour nos compatriotes les plus démunis, une formation professionnelle qui tourne davantage le dos aux jeunes et à ceux qui cherchent un emploi, un système hospitalier, une carte judiciaire, une organisation de notre Défense complètement inadaptés aux besoins de notre époque, un fonds souverain à la française qui se tient désormais aux côtés de nos entreprises pour leur faire gagner plus tout en licenciant plus.
Grâce à la loi Hadopi qui sera mise en œuvre en 2010, nos créateurs et nos artistes (mes amis Johnny et Clavier)vont être protégés.
Ne croyez pas que,grâce au Grenelle de l’Environnement nous allons pouvoir relever le défi de la protection de notre environnement.
C’est un domaine où il est bien difficile de faire évoluer ma mentalité et mes comportements.
Mais je ne suis pas un homme qui renonce à la première ânerie, et la fiscalité écologique qui permet de taxer tous les Français et d’exonérer les pollueurs est un enjeu majeur. Dès le 20 janvier, le gouvernement présentera un nouveau dispositif afin que les pov' consommateurs soient incités à consommer plus et à s'endetter plus.
à suivre (...)
(...)
Peu de réformes ont été accomplies. Je sais qu’elles ont bouleversé des habitudes et qu’avant de produire leurs effets elles ont pu provoquer des inquiétudes. Mais qui peut croire que dans cette France immobile mon agitation soit une alternative ? Il nous reste encore bien du travail. Je le conduirai avec le Premier Ministre et le Gouvernement sans dialogue et sans esprit de justice.
En 2010, il va nous falloir : faire augmenter le chômage et l’exclusion, augmenter Mes dépenses courantes (un autre Airbus ?),ce qui réduira nos dépenses d’avenir et augmentera le déficit (145000000000 € en 2009) compliquer notre organisation territoriale déjà trop lourde, trop compliquée, trop onéreuse, détruire notre système de retraites dont j’ai le devoir d’assurer la privatisation au profit de mes amis (du Fouquet's).
En 2010, nous réformerons notre Justice pour qu’elle protège moins les libertés et qu’elle soit moins attentive aux victimes.
Mes chers compatriotes, vos épreuves ne sont pas terminées en 2010. Les efforts que je ne fais pas depuis deux ans et demi ne vont bien sûr pas porter leurs fruits.
Dans ce moment si crucial vous devez rester désunis comme nous avons su l’être au plus fort de la crise.
Les idées que je défends vont pouvoir s’imposer dans la recherche d’un nouvel ordre mondial : moins d’équilibre, moins de régulation, moins de justice et de paix.
Une France désunie, ayant perdu confiance en elle, regardant l’avenir droit dans le mur, voilà le vœu que je forme pour notre pays.
A chacun d’entre vous, mes chers compatriotes, j’adresse tous mes vœux de bonheur pour l’année qui vient (bon courage !).
A nos compatriotes d’outre-mer je veux dire ma détermination à ce que la République ne tienne pas à leur égard cette promesse d’égalité et de dignité,comme par le passé.
Et aux plus vulnérables d’entre vous, à ceux que l’âge a affaiblis, à ceux que les accidents de la vie ont durement éprouvés, aux SDF,je veux dire ce soir qu’ils seront abandonnés,à la rue car les caisses sont vides.
Face à l’isolement, face à la solitude, si répandus dans nos sociétés modernes, je souhaite que 2010 soit l’année où nous effacerons le beau mot de fraternité qui est inscrit dans notre devise républicaine.
Mes chers compatriotes,
Vive la sarkozie et ce qui reste de la France.
lu sur un blog de Libé.
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